Résumé complet : Clé de voûte des toitures végétalisées, le sol en place influence directement et indirectement les services écosystémiques rendus par celles-ci. En dépit du rôle majeur de ces sols, peu d'études leur sont consacrées. Par ailleurs, des produits non renouvelables tels que la pouzzolane, l'argile expansée ou la tourbe sont aujourd'hui très majoritairement utilisés dans leur composition. Nous avons étudié des Technosols, c'est à dire des sols reconstitués de toitures productives composés uniquement de produits issus de résidus du milieu urbain. Ce travail a eu une double ambition : évaluer quantitativement les services écosystémiques rendus et comprendre les premières phases d'évolution des Technosols. Pour cela, trois dispositifs expérimentaux, installés sur la toiture « Bertrand Ney » de l'école AgroParisTech ont été utilisés. Il s'agit de bacs de cultures dans lesquels des sols sont construits, avec des agencements divers de cinq résidus urbains: un compost de déchet vert, du bois broyé, de la brique et de la tuile concassée, un résidu de champignonnière et un compost de biodéchet. Nous avons étudié l'effet des différents types de Technosols construits sur les services écosystémiques rendus, la production alimentaire (quantitative et qualitative), la fertilité physico-chimique et leur évolution temporelle. Les Technosols construits sont fertiles et permettent une production alimentaire conséquente sur une à cinq années, caractérisée par de faibles teneurs en éléments traces métalliques équivalentes à celles de la moyenne des productions maraichères. L'évaluation quantitative de services écosystémiques (production alimentaire, recyclage de résidus urbains, rétention des eaux de pluies et qualité des eaux de percolations, a souligné le caractère multifonctionnel des systèmes étudiés et met en évidence un disservice, qui est une altération de la qualité des eaux de percolation par lixiviation du carbone, pouvant être liée à celle d'autres éléments. Une première phase de pédogénèse rapide et intense est observée, marquée par une forte biodégradation des matériaux et une forte lixiviation. Nos travaux ont mis en évidence l'existence d'un double compromis dans la conception d'un Technosol productif, entre (1) la biodégradation des matériaux (assurant la fourniture des nutriments minéraux aux plantes) et le maintien de la structure et porosité du matériau, donc de sa fertilité physique d'une part et entre (2) la fourniture d'éléments nutritifs par biodégradation et la lixiviation, se traduisant par une perte de ces éléments et une altération de la qualité des eaux de percolation d'autre part. La connaissance des propriétés des matériaux utilisés et de leurs liens avec les services écosystémiques attendus permet déjà de concevoir des toitures productives multifonctionnelles à partir de résidus urbains et de les gérer de manière durable. (résumé de l'auteur)